Sylviculture
La sylviculture est l'art et la science de cultiver les forêts. C'est l'une des disciplines de la foresterie. La sylviculture a pour rôle de faire évoluer les forêts, en mettant à profit les facteurs écologiques...
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Définitions :
- Etude des arbres forestiers (par opposition à Arboriculture pour les arbres fruitiers). (source : hobbesworld)
La sylviculture est l'art et la science de cultiver les forêts. C'est l'une des disciplines de la foresterie. La sylviculture a pour rôle de faire évoluer les forêts, en mettant à profit les facteurs écologiques et les potentialités naturelles, afin d'optimiser durablement les produits et les services que l'homme peut en attendre. Le sylviculteur veille essentiellement à la régénération, à la récolte ainsi qu'à l'éducation des forêts.
La «sylviculture durable» renforce l'idée que la gestion doit veiller à ne pas surexploiter le milieu pour qu'il ne perde pas de son potentiel dans le futur, ni sa capacité de résilience écologique, face aux modifications climatiques par exemple. Certains modes de gestion apportent une attention plus soutenue à l'environnement ainsi qu'à la biodiversité.
Ajustement de l'offre et de la demande
Pour des raisons économiques, la sylviculture cherche à ajuster son offre de bois à la demande, ce qui est spécifiquement complexe compte tenu de la lenteur relative de croissance des arbres, et parce que la demande peut fluctuer dans le temps (Colbert plantait pour la marine, mais lorsque les chênes sont arrivés à maturité, les navires étaient fabriqués en acier). Un choc pétrolier fait grimper le prix du bois, qui peut chuter 10 ans après. La croissance des importations de bois tropicaux a fait perdre de leur rentabilité à certains bois locaux. Une tempête, des incendies, les modifications climatiques sont des aléas mal anticipés.
En France, après guerre, on a encouragé la culture des résineux pour la construction, mais ce marché n'a pas répondu aux espoirs des forestiers. Il s'agit aussi d'assurer des revenus aux propriétaires, sachant que la chasse peut y contribuer pour 50 % et plus.
Sylviculture, biodiversité, conservation génétique et service écologique
A long terme, la sylviculture a besoin d'une certaine diversité génétique. La forêt naturelle ou peu anthropisée joue un rôle de conservation génétique d'espèces animales et végétales et , au-delà, si son étendue est suffisante, des processus d'évolution. Mais dans l'hémisphère nord et dans plusieurs zones tropicales, les forêts ont depuis 2000 ans ou plus récemment énormément régressé, et elles sont de plus en plus fragmentées et pour celles faisant l'objet d'une sylviculture, fréquemment particulièrement artificialisées, perdant quelquefois des éléments biologiques remarquables que des gestions passées avaient su conserver. Des opérations sylvicoles (conversions de peuplements particulièrement artificiels en peuplements plus naturels) peuvent être nécessaires pour assurer la pérennité de ces éléments.
De plus, une forêt protégera le plus souvent mieux contre des départs d'avalanches, éboulements ou glissements de terrain si elle présente (en permanence) une composition, une structure et des classes d'âge adaptées, état qu'une gestion active peut contribuer à entretenir.
Sur un plan social ou socioculturel, certaines formes de sylvicultures permettent de façonner, restaurer ou maintenir certains paysages, et de créer des conditions d'accueil et d'ambiance appréciées du public. Certains sylviculteurs cherchent ainsi à limiter les effets des coupes à blanc, par exemple en diminuant leur taille ou en conservant pour les cacher une bande boisée qui servira aussi de corridor biologique et de lisière protectrice pour les parcelles plantées ou en régénération.
Une étude du CEMAGREF à paraitre [1] a conclu qu'en Europe la richesse des espèces animales et végétales a tendance à être moindre dans les forêts exploitées que dans celles les forêts non exploitées, mais les résultats changent selon les espèces. Les espèces pionnières de plantes à fleurs et fougères peuvent être favorisées par des coupes qui leur procurent de l'espace et du soleil. Par contre, la richesse spécifique des mousses, des lichens, des coléoptères saproxyliques et dans une moindre mesure des champignons est moins forte dans les forêts exploitées : à peu près 7 000 espèces d'insectes, champignons, mousses, pics ou chauve-souris dépendent directement du bois morts et de nombreuses autres en dépendent indirectement. Le bois mort est un des principaux "chainons manquants" en forêt exploitée. L'étude montre qu'une partie de la biodiversité forestière se reconstitue avec le temps, mais souligne que la recolonisation peut être complexe ou alors impossible à échelle humaine de temps sans une politique de gestion restauratoire sur le long terme, et sans la création d'un réseau de "forêts anciennes" incluant " des réserves intégrales à l'échelle européenne". Une sylviculture dite "proche de la nature" inclut le plus souvent ces objectifs, mais à ce jour fréquemment sans vision globale de type réseau écologique et fréquemment sans réserves naturelles. D'autre part, les mesures de gestion dite "conservatoire" (rétention d'arbres sénescents, augmentation des volumes de bois mort... ) sont trop peu fréquemment évaluées de manière scientifique.
Objectifs
Apparaissant comme le moyen de faire évoluer la forêt vers des objectifs à long terme, la sylviculture «souhaitable» en un lieu donné dépend schématiquement de trois principaux facteurs :
- Les conditions «stationnelles» : elles déterminent les possibilités de croissance et d'utilisation des diverses espèces végétales ; elles limitent le choix des essences qui pourront être utilisées. Elles peuvent en outre imposer des précautions sylvicoles, ou alors certains types de sylvicultures ; c'est le cas des stations forestières rares et remarquables, de certains milieux humides par exemple ; c'est toujours le cas des stations fragiles, soumises à des risques prononcés d'érosion, d'engorgement par remontée du «plan d'eau», de dégradation d'un sol peu stable, etc. Ses conditions dépendent de la nature du sol (argile, limon, podzol, ... ) et du climat.
- L'état de l'écodispositif forestier : il est lié surtout aux essences, aux structures, aux densités des peuplements en présence, peut apporter de fortes contraintes au sylviculteur. Il ne sera jamais envisageable, par exemple, d'appliquer un traitement de futaie jardinée à un vieux peuplement à faible durée de survie ou d'éclaircir fortement et rapidement une futaie devenue trop dense ;
- Les objectifs fixés : pour le moyen et le long terme, ils contribuent d'une manière décisive aux choix sylvicoles. Des objectifs multiples sont le plus souvent associés : la gestion est dite «intégrée» ou «multifonctionnelle». Mais certains objectifs généraux ou transversaux sont pris en compte dans l'ensemble des sylvicultures :
-
- objectif de conservation de l'ensemble des potentialités au profit des générations futures, ce qui fait dire que la gestion est «durable» ; cet objectif interdit toute transformation irréversible ; il impose le maintien, à titre de précaution, de l'ensemble des ressources biologiques, espèces animales et végétales, écotypes, gènes... ; il va désormais au-delà en incluant la conservation de l'ensemble des éléments de la biodiversité, une attention toute spécifique étant portée aux éléments les plus remarquables ;
- objectif de maintien ou de conduite de la forêt vers les mosaïques d'écodispositifs les plus stables grâce à des essences et des structures bien adaptées ainsi qu'à l'équilibre judicieux entre les divers stades d'évolution ; cet objectif répond à un haut niveau d'ambition pour une «gestion durable» ;
- objectif de maintien des types de paysages caractéristiques et appréciés ou d'atténuation des modifications paysagères.
Outre ces objectifs généraux, d'autres objectifs sont affectés particulièrement à telle ou telle zone ; ce sera, par exemple, la production de bois d'œuvre, l'accueil du public, la protection d'un paysage remarquable, la rétention de la neige, la préservation d'une espèce ou d'un milieu rare, la conservation des processus naturels d'évolution. Plusieurs objectifs spécifiques sont le plus fréquemment associés ; ainsi des objectifs de protection et d'accueil accompagnent le plus souvent l'objectif de production ; mais la même sylviculture ne peut le plus souvent les optimiser tous en même temps ; l'un d'eux est choisi comme «l'objectif déterminant» : il induit le modèle de sylviculture à appliquer et ces modèles de sylviculture sont obligatoirement particulièrement divers. Ces considérations montrent qu'il ne peut y avoir un type général de sylviculture, mais plutôt des sylvicultures particulièrement diverses, adaptées aux stations, aux peuplements, aux objectifs en chaque lieu. Elles montrent toujours que les sylvicultures ne peuvent être figées dans le temps. Il arrive qu'une sylviculture douce soit maintenue dans certaines Réserve naturelle ou Réserve biologique (domaniale, forestière, dirigée.. par exemple pour contrôler des essences invasives et/ou exotiques, ouvrir des clairières, etc. )
Régimes et traitements sylvicoles
Les forestiers ont développé des techniques pour adapter les forêts à leurs attentes et "conduire" les arbres jusqu'au stade que le sylviculteur considère être leur stade de maturité.
En zone tempérée, on peut distinguer 6 classes de régime et mode de traitement sylvicoles
- coupe rase (ou coupe à blanc),
- futaie régulière,
- futaie irrégulière (peut-être mélangée, et/ou jardinée),
- mélange futaie feuillue/taillis,
- taillis simple,
- mélange futaie résineuse/taillis.
Les trois régimes de base sont : taillis, taillis sous futaie et futaie.
- Le "taillis" est constitué de rejets et/ou de drageons, dont la perpétuation est obtenue par une coupe de rajeunissement, ce qui correspond à un renouvellement assuré par voie végétative. L'objectif du taillis est de produire des bois de petites circonférences destinés au bois de chauffage. Il exige des essences qui rejettent de souches (noisetier, érable, châtaignier... )
- La "futaie" est issue d'un peuplement forestier composé d'arbres provenant directement de semis sur place. Son but est de produire des arbres qui donneront un maximum de bois d'œuvre.
- Le régime du "taillis sous-futaie" est un régime mixte qui a pour objet de perpétuer des peuplements comportant des arbres dont certains sont nés de semences et d'autres obtenus par voie végétative. Il sert à produire du bois de chauffage et du bois d'œuvre.
Dispositifs d'exploitation des arbres
Il existe quatre méthodes principales d'exploitation forestière, nommées «dispositifs d'exploitation sylvicole», caractérisés par leurs modalités de coupe, mais également de «régénération» (façons de préparer un nouveau lit de germination après l'abattage des arbres, c'est-à-dire les moyens pour régénérer le prochain peuplement.
- La coupe rase : on rase la totalité de la forêt puis on laisse pousser les semis naturels. C'est une solution économique car on peut faire de l'abattage mécanique et une extraction facile mais on obtient une forêt uniforme avec des arbres ayant tous le même âge. De plus, cette coupe porte préjudice au sol car attire l'eau en sa surface. Il devient par conséquent plus spongieux.
- La coupe de jardinage : on coupe périodiquement seulement les arbres matures. C'est une méthode plus écologique mais plus coûteuse car on extrait qu'une petite quantité de bois à chaque fois sans possibilité d'abattage mécanique et on risque des dégâts collatéraux à chaque coupe.
- La coupe d'ensemencement : seuls 10 % des arbres sont conservés comme reproducteurs dans toute la zone de coupe
- La coupe progressive de régénération : on coupe les arbres les plus âgés sur une période de dix à quinze ans, pour permettre la reproduction naturelle et de produire des peuplements d'âge assez régulier.
Méthodes de régénération
Sous le régime du taillis, la régénération se fait spontanément, par voie végétative.
Sous le régime du taillis-sous-futaie, la régénération combine deux modes (sexués et végétatifs).
Dans les autres cas (régime de futaie), une «régénération» se fait par voie sexuée, avec deux choix envisageables pour le sylviculteur : «régénération naturelle» ou «régénération artificielle», avec dans ce dernier cas deux méthodes principales :
- semis direct ; Les graines d'arbres sont fréquemment choisies pour une croissance et une résistance aux maladies supposées meilleures.
- plantations de plants issus de pépinière ; Ces plants ayant été plus ou moins choisis (par exemple issu de graines de «provenance certifiée» (peut-être au détriment de leur diversité génétique, en particulier si ce sont des clones). Les plants sont alors cultivés durant au moins un an, en godets ou plus fréquemment en sachets en polyéthylène et de plus en plus fréquemment sur un substrat artificiel (tourbe-vermiculite). Ils peuvent aussi être cultivés en pleine terre puis plantés racines nues, ce qui demande un soin attentif.
Hors des écoles sylvicoles de type «Prosilva» (moins interventionnistes) ou de méthodes de type «méthode Speich[2]» ; lorsque le forestier n'ose pas la régénération naturelle et veut boiser une grande parcelle, ou convertir une monoculture (de type peupleraie ou pessière) en forêt plus diversifiée, il a le choix entre deux principales méthodes, décrites ci-dessous :
Plantation
La seconde moitié du XXème siècle a historiquement été en Europe et surtout en France marquée par une phase de plantation intensive. Celle-ci a été préparée et facilitée par la mécanisation de la plantation développée à l'occasion de la création des forêts de guerre et de zone rouge (séquelles de guerre) après la Première Guerre mondiale. Les forêts subventionnées (enrésinements des années 1960-1970, populicultures des années 1970 à 90) et le développement des futaies et coupes rases au détriment du taillis sous futaie ou de la futaie jardinée ont naturellement poursuivi dans cette voie, induisant des faciès boisés d'aspect quelquefois particulièrement artificiels (monocultures «en rangs d'oignons»).
La méthode a en fait été rodée en zone tropicale avec les plantations industrielles d'hévéas qui ont en quelque sorte préparé celles de palmier à huile ou d'eucalyptus, et en Europe de l'ouest au XXe siècle où elle semblait plus en accord avec la rationalisation de la sylviculture et une volonté de maîtriser le «matériel végétal» et sa génétique. Elle a beaucoup détrôné les techniques de semis direct reconnus comme trop aléatoires et éloignées de la standardisation recherchée pour les arbres. Le bilan coûts/avantages des plantations a cependant été rereconnu à la fin des années 1990, surtout à la faveur des réflexions suscités par les dégâts des tempêtes, pour faire ressurgir l'intérêt des semis directs.
La plantation de plants issus de pépinière doit mettre en balance ses avantages et inconvénients :
Avantages :
- Planter sert à choisir les essences d'arbres et les "géniteurs" et par conséquent de créer des plantations qu'on espère idéalement adaptées aux conditions locales ainsi qu'aux objectifs de rentabilité.
- Les protocoles de plantations sont connus et éprouvés.
- Des personnels constitués existent.
Inconvénients :
- Coûts élevés : c'est la plus coûteuse des méthodes, surtout sur fortes pentes et dans les zones peu accessibles ;
- Appauvrissement de la diversité génétique des boisements, et par conséquent certainement à long terme au détriment de leur résilience écologique ; la biodiversité génétique est diminuée et par conséquent la stabilité du peuplement ou sa résistance à des maladies (en particulier rouille pour le peuplier) peuvent en pâtir. On procède en alignant et en espaçant régulièrement les plants, fréquemment depuis les années 1980 après un sous-solage, un dessouchage, ou alors un traitement désherbant, un labour et un apport d'engrais dans le cas de certains boisements intensifs (peupleraies, eucalyptus). Certains pays imposent une provenance certifiée des graines dont les plants sont issus, ce qui a contribué à toujours diminuer l'hétérogénéité génétique des forêts plantées, au risque de diminuer leur stabilité et leur capacité de résilience écologique.
- Risques sanitaires : surtout d'introduction directe de maladies contagieuses (phytopathologies) à partir de la pépinière (rouille, feu bactérien, chancres bactériens, parasites.. ) et peut être risque de mauvaise mycorhisation ;
- Dégradation des sols, habitats naturels et des eaux de surface : cette méthode nécessite le passage d'engins qui induisent un tassement des sols, ou alors localement leur asphyxie. Le dessouchage chimique, ou alors le désherbage chimique, de plus en plus fréquemment pratiqués perturbent le milieu et le polluent ;
- Dégâts du gibier ? La plantation induit une main d'œuvre importante et une présence humaine plus marquée et longue, susceptible d'augmenter l'abroutissement et frottis sur les plants par des animaux (qui veulent marquer leur territoire à l'endroit où ils sentent l'odeur humaine).
Semis direct
Après la régénération naturelle, le semis direct est la technique qui a été la plus utilisée jusqu'au milieu du XXe siècle. Elle demande une bonne connaissance de la germination des graines, et une maîtrise des risques de prédation des graines et jeunes arbres (comme pour la plantation, avec dans ces deux cas un savoir et savoir-faire qui, pour partie, existent chez les pépiniéristes et sylviculteurs).
Remarques préalables
- Le semis direct n'implique pas d'obligation de semer des essences adaptées au substrat et au climat, mais on peut alors compter sur la sélection naturelle pour éliminer les espèces inadaptées et permettre la réapparition spontanée d'essences locales.
- Le semis direct n'implique pas non plus le choix d'essences locales, il peut par conséquent permettre l'introduction d'essences peu favorables à la biodiversité (essences introduites, adaptées au contexte édaphique, mais non aux écodispositifs qu'elles risquent de perturber ou dégrader), ou alors d'espèces qui pourraient devenir invasives.
Avantages :
- Simplicité, moindres besoins de matériel et main d'œuvre, et par conséquent moindres coûts ;
- Meilleure résilience pour le futur boisement, mais à condition qu'il s'agisse d'essences locales et adaptées aux conditions stationnelles
- Les coûts étant diminués, le sylviculteur peut se permettre une forte densité de points d'ensemencement qui encourageront une meilleure sélection naturelle, des arbres bien droits dans la course à la lumière, et un auto-élagage au fur et à mesure de la croissance du boisement.
- Comme le recommandent certains forestiers (Andréas Speich par exemple), les coûts moindres permettent de planter des graines d'essences pionnières tout d'abord, et secondaires 10 à 20 ans plus tard.
- Le contexte climatique incertain et l'importance croissante donnée à la biodiversité et par conséquent à la sélection naturelle (dont comme facteur de résilience écologique de la forêt) a – comme en agriculture – redonné de l'intérêt au semis direct. Il est à nouveau reconnu comme méthode de régénération artificielle efficace et économique par exemple pour la conversion de monocultures en peuplements mélangés. Le semis direct étant presque tombé en désuétude après 1918, il avait peu été étudié scientifiquement ou pour sa rentabilité économique. À la fin du XXème siècle, certains de ses avantages ont été remis en lumière par des études en montrant l'intérêt écologique (si les essences sont locales et adaptées au substrat), sylvicole, mais en particulier économique (s'il est bien maîtrisé).
Des études (d'ailleurs quelquefois divergentes dans leurs conclusions) avaient porté sur les conditions de réussite du semis direct, mais on manquait de comparaison directe des taux de survie et de la vigueur des arbres à moyen et long terme selon qu'ils sont issus de semis direct ou de pépinière ou d'une régénération naturelle.
- Une étude récente a conclu que les plants issus de pépinières souffrent de la transplantation et perdent une bonne part de leur avance dans les 10 premières années de reprise. [3]. On a ici comparé sur 9 ans de jeunes hêtres issus de semis directs et issus de pépinière (replantés à l'âge de 1 an) ; les chercheurs ont mesuré la croissance en hauteur et en diamètre, et la biomasse sèche produite en 9 ans. Cette étude a montré qu'après 9 ans, il n'y avait déjà plus de différence entre les deux catégories d'arbres. Certains arbres issus de semis avaient même rattrapé l'année de retard qu'ils avaient comparé aux plants (croissance d'environ 10 % plus importante).
Inconvénients :
- S'il ne s'agit pas de plantation sous couvert forestier, les essences pionnières pousseront énormément mieux que les essences secondaires.
- Le savoir-faire en matière de plantation directes de graines et de préparation de ces graines est plus rare.
- La qualité et la provenance des graines ne sont pas forcément faciles à établir.
Opérations sylvicoles
Elles comprennent éclaircissages, dépressages, élagages, plantations, semis directs, et pare-feu (dans les régions sèches).
Éclaircies
Les éclaircies sont des coupes d'arbres de franc pied au stade de «compression», autrement dit de la croissance juvénile puis de brins plus âgés (baliveaux) d'une cépée (si le peuplement est dense). Elles visent à faciliter le développement des arbres présentant un intérêt (le plus fréquemment économique) par élimination d'arbres proches jugés moins intéressant. Le sylviculteur doit veiller à ce que l'investissement en temps et en hommes soit compensé par un gain économique, qualitatif et quantitatif des volumes récoltés. Une technique moderne mais toujours peu employée, surtout prônée par l'approche Prosilva consiste à sélectionner les tiges d'avenir dès le stade fourré au stade haut-perchi, avec des moyens doux (par cassage ou annelage/écorcage au moyen d'un appareil particulièrement conçu) ; les tiges meurent sur pied en retournant à l'humus forestier, ce qui minimise la main d'œuvre, le tassement et le dérangement (pas de bruit de tronçonneuse, pas de transport, recyclage in situ de la biomasse en bois mort et humus) A ce stade layons ou routes forestières ne sont pas nécessaires, ce qui laisse plus de place à la forêt ainsi qu'à la production de bois.
En respectant la dynamique naturelle de croissance des espèces présentes (diagnostic tendanciel), on peut - avec peu de moyens, en respectant mieux l'environnement - choisir les futures tiges d'avenir dans les jeunes peuplements, pour des rendements économiques soutenus [4].
Balivage
Le balivage est l'action de repérer les troncs les plus vigoureux pour les conserver. L'objectif est de perfectionner le taillis pour le faire évoluer vers une futaie. Selon le type d'arbre, ce repérage se fait quand l'arbre a à peu près 15 ans. Le balivage intensif est le fait de conserver au moins 300 baliveaux à l'hectare.
Dépressage
Le dépressage consiste à supprimer certain nombre de jeunes sujets issu d'une régénération naturelle dans un peuplement particulièrement dense dont la hauteur des tiges dominantes est le plus souvent inférieure à 9 m, toujours pour perfectionner la croissance de ceux restant. Cette opération est effectuée avec une débroussailleuse à dos, par cloisonnement ou par abattage.
Élagage et taille de formation
L'élagage et la taille de formation consistent à couper au ras du tronc les branches pour perfectionner la forme et la qualité du fût et du bois, en réduisant la taille des "nœuds" dont les fibres ne sont pas dans le même sens que le reste du bois, qui entraîne une faiblesse dans les pièces produites ou un déclassement commercial. La hauteur d'élagage fluctue généralement entre 2 et 10 mètres, et il se pratique dans les sylvicultures intensives l'ensemble des 10 ans sur les jeunes arbres. De nombreuses espèces, en condition de concurrence pour la lumière font un autoélagage naturel, qui est favorisé dans les approches de type prosilva, ce qui diminué les coûts d'entretien et limite les risques de transmission de champignons et bactéries pathogènes par les outils de coupe ou de taille.
Pare-feu
L'objectif des pare-feu est de créer une discontinuité dans le peuplement forestier pour stopper ou ralentir la progression d'un feu. Ils doivent être installés perpendiculairement aux vents dominants pour ne pas au contraire devenir des couloirs de propagation du feu. Un pare-feu mal conçu ou mal entretenu risque aussi d'être un facteur d'érosion, ou alors de fragmentation écopaysagère et de propagation du feu. Ceux qui sont enherbés et entretenus par des herbivores (moutons généralement) semblent les plus efficaces. Ils jouent le plus souvent aussi un rôle de cloisonnement et de layons de chasse (les chasseurs y attendent le gibier, plus facile à tirer, peut-être poussé par les chiens et rabatteurs).
Qualité du travail
Dans l'ensemble des cas, la limitation du tassement des sols et la protection des arbres d'avenir lors des chantiers sont important. A titre d'exemple une étude[5], faite en France sur 48 chantiers de coupes en forêt a trouvé que (en moyenne et toutes essences confondues) 14 % d'arbres étaient blessés lors des chantiers (Ce taux était plus important en feuillus (17 %) qu'en résineux (11 %). Des professionnels bien constitués, et certaines techniques alternatives (ex : débardage par câble) permettent de diminuer ce risque.
Nouvelle méthode dite «extensive»
La sylviculture extensive s'applique actuellement en Europe essentiellement dans les peuplements de hêtre. C'est une méthode «douce», qui exploite un peuplement via des interventions ciblées. Les coûts en sont moindres, et dispersés sur la durée d'exploitation, tout en assurant une régénération de qualité, et en préservant ou restaurant la biodiversité. Sa mise en place s'effectue en trois phases majeures : L'installation-acquisition, la compression et le détourage.
Phase dinstallation-acquisition : Le gestionnaire forestier vérifie que l'installation des semis est en place afin d'entreprendre la coupe définitive des semenciers. Pendant les deux premières années, il s'assure que les semis ne soient pas concurrencés par la souille ligneuse et ronceuse. Le cas échéant, il prévoit un passage en dégagement grossier à la débroussailleuse pour maîtriser la végétation afin d'obtenir la plus forte régénération de l'ou des essences objectives.
Phase de compression : Le hêtre - si on le veut longiligne - doit pousser «gainé» ou en «compression» (autrement dit à l'ombre d'arbres dominants, ou gainé d'herbacées lorsqu'il est jeune et mis en lumière, et ensuite entouré d'autres arbres qui faciliteront sa pousse apicale). S'il est isolé ou trop dégagé, il tend à développer des branches basses, sources de caractères reconnus comme «défauts» majeurs pour le scieur (ex : fourches basses). La «phase de compression» peut durer quinze ans ou alors plus. Elle permettra d'obtenir à un stade «gaulis» - «bas perchis» des «tiges-objectifs» dépourvues de branches basses, réduisant le coût d'un élagage éventuel. Néanmoins, durant cette phase, un travail reste indispensable pour le calibrage de la régénération des essences secondaires et d'accompagnement (charme, frêne, érables... ) ou essences précieuses (merisier, alisier torminal.. ). La méthode de "cassage" est alors utilisée sur les tiges concurrentes pour faciliter la mise en lumière apicale, fournissant une source locale de petit bois mort. Au stade bas perchis, le cassage sera remplacé par l'annélation des tiges singulières pour toujours garder l'efficacité de la compression et une source de bois mort recyclé dans l'écodispositif. A ce stade on considère généralement acquise la régénération de 200 tiges / hectares.
Phase de détourage : Au contraire de l'éclaircie classique, elle est ciblé sur une tige désignée «d'avenir»[6] et n'est pas sujet à la commercialisation. L'intervention consiste sur des tiges (stade perchis - haut perchis) dont la hauteur de bille sans branche est comprise entre 7 et 8 mètres, d'abattre l'ensemble des sujets environnants pour libérer les houppiers en vue de la croissance finale. La quantité sera de 80 à 100 tiges par hectare et formera la jeune futaie. Si on veut limiter le travail, le dérangement de la faune, et une alternative peut aussi être l'annélation de tout ou partie de ces tiges à «éliminer». Leur bois est alors aussi recyclé sur place.
Conditions de croissance des stations forestières
La caractérisation des milieux par la typologie des stations forestières est un préalable à une gestion forestière raisonnée, permettant d'éviter l'installation d'essences non adaptées au terrain.
L'anticipation des risque de sécheresse ou d'inondation de longue durée est aussi un facteur de réussite, de même qu'une bonne diversité génétique et la protection de l'humus[7], et pourrait le devenir plus toujours dans un contexte global de modifications climatiques.
La concurrence herbacée, et l'abroutissement par les herbivores (cerf, chevreuil, sauf en cas de fortes populations) ne pose théoriquement pas de problème pour les peuplements, outre dans le premier stade en cas de plantations ; la transpiration herbacée est maximale au début du printemps lorsque l'eau ne manque pas. Elle diminue ensuite tandis que avec la feuillaison du couvert arboré. Pour que l'eau manque moins en été, il peut être utile de restaurer les capacités de stockage de l'eau et d'infiltration. (Il ne s'agit pas nécessairement de diminuer le drainage de la forêt ou d'y aménager des bassins ; Le retour des castors et de leurs réservoirs s'est montré de ce point de vue efficace en Amérique du Nord).
Histoire de la sylviculture
La sylviculture est ancienne. Elle a des racines probables dans la préhistoire et en Chine qui l'a développé, tout en déboisant rapidement une grande partie du territoire dès 8000 ans avant nos jours. La sylviculture était une science suffisamment reconnue pour que quand l'empereur Qin Shi Huang (nom signifiant «premier empereur universel» 221 ans avant J. C. ordonna de brûler l'ensemble des ouvrages indésirables, il fit 3 exceptions pour les seuls livres traitant de médecine, d'agriculture et de sylviculture.
Sur l'ensemble des continents, des secrets et des savoirs ouverts se transmettaient sur les manières de planter, sélectionner, ou tailler les arbres. Des écoles de sylvicultures ont diffusés des pratiques et savoir faire, avec plus ou moins de bonheur et d'efficacité, qu'on peut classer entre deux extrêmes, toujours actuellement fréquemment opposés ;
- dans la forêt naturelle même, ou à sa lisière, avec des pratiques extensives s'appuyant sur la sylvigenèse naturelle et la régénération, avec une sélection lente, et quelques plantations (ex : citronniers ou cacaoyer plantés en forêt, plantation de deux sagous par sagou coupé.. )
- en dispositifs artificiels et intensifs, appuyés sur des plantations en monoculture, des pépinières et une sélection importante (gènes, graines, plants, baliveaux, arbres en croissance, portes-graines)...
France
En 2006, 75 % du volume de bois commercialisés dans les forêts domaniales était vendu «sur pied» par adjudication le plus fréquemment, avec 6 658 000 m3 de bois récoltés chaque année (résultats moyens 1995/2004 exprimés en volume “bois forts”) [8] ; En 2007, la forêt française (publique et privée) couvre à nouveau plus de 25% du territoire national, au profit d'une sylviculture plus étendue (résineux et peupleraies surtout). Sa répartition et la composition de ses espèces ne sont pas liées qu'aux seules conditions édaphiques et climatiques. Avant le XXème siècle, la forêt française avait fortement régressé : Du Moyen Âge jusqu'au début du XXe siècle, on a assisté à une période de défrichage intensif visant à gagner des terres de culture, récolter plus de bois de chauffage, de boulange et d'œuvre. Colbert et le code forestier de 1827 ont finalement bloqué la régression du couvert forestier. Dans le même temps, un renouveau forestier était favorisé par les alternatives fossiles que sont le charbon puis le pétrole et le gaz naturel ou alors l'électricité nucléaire, mais également grâce à l'exploitation massive (surexploitation quelquefois) des forêts tropicales. Ces alternatives ont d'autre part fortement contribué au développement économique des pays riches, qui a encouragé à une urbanisation centralisée (et par conséquent un exode rural libérant des terres aux plantations ou à l'enfrichement ainsi qu'à la forestation spontanée). Des primes d'état et détaxations ont aussi encouragé les sylviculteurs à étendre leurs surfaces boisées, tandis que le perfectionnement des rendements agricoles et la concentration de l'agriculture sur les sols les plus riches libéraient les terres les plus pauvres ou pentues. Cette augmentation de surface forestière. Mais tandis que les plantations de faible intérêt en termes de biodiversité gagnaient du terrain, le bocage, l'agrosylviculture respectant les traditions et des arbres isolés et d'alignements reculaient ou disparaissaient rapidement, avec leur biodiversité... les remembrements et primes à l'arrachage des haies et fruitiers, etc. ont eu des impacts particulièrement importants en Europe, et surtout en France dans les années 1960 à 1980.
A partir cette époque, on a reboisé certains territoires pour les revaloriser (Sologne, Limousin), pour combattre l'érosion (Cévennes), pour fixer les dunes (Landes).
Un Règlement National d'Exploitation Forestière [9] (RNEF) a été publié en complément des clauses générales des ventes de bois. Il contient les prescriptions relatives à l'exploitation forestière qui étaient antérieurement dispersées dans plusieurs documents (clauses générales des ventes de bois sur pied, clauses communes territoriales), et vise à ce que l'exploitation diminue son impact environnemental et sur la régénération de la forêt, respecte les biens et personnes, dans l'ensemble des phases de la mobilisation des bois.
Voir aussi
Liens externes
- Site de L'ONF (Office National des Forêts ; Gestionnaire de l'espace forestier public français).
- Fiches techniques du CRPF Aquitaine
- Politique forestière Site du ministère français de l'agriculture
Bibliographie
Notes et références
- ↑ Yoan Paillet, Laurent Bergès et al (2009, sous presse). Biodiversity differences between managed and unmanaged forests : meta-analysis of species richness in Europe. Conservation Biology. Cette étude comparant la biodiversité de forêts européennes exploitées ou non exploitées depuis au moins 20 ans a été réalisée sur la base de 49 articles scientifiques publiés depuis la fin des années 1970.
- ↑ Andréas Speich, ancien directeur de la Forêt de Zurich a mis au point et promu une méthode basée sur la plantation - en semis direct si envisageable - d'essences pionnières et locales, puis quelques années après, d'essences secondaires, dans un réseau de mini-parcelles clôturées donnant la possibilité le pacage d'herbivores, le temps que ces bosquets soient eux mêmes porte-graines (les clôtures sont alors retirées) )
- ↑ Ammer CH., Mosandl R. 2007. Wich grow better under the canopy of Norway spruce – planted or sown seedlings of European beech ? [forestry. oupjournals. org Forestry] 80 (4) : 385-395 (11 p., 1 tab., 5 fig., 49 réf. ).
- ↑ MOYSES F. [2009]. Du fourré au haut perchis : un foisonnement d'énergie. La Forêt Privée 307 : 35-40 (6 p., 5 fig., 4 réf. ).
- ↑ étude faite par l'AFOCEL en 2005 et 2006 ; Cacot E. [2008] ; «Organisation des chantiers d'exploitation forestière». Rendez-Vous techniques 19 : 26-29 (4 p., 2 fig., 5 tab., 2 réf. ).
- ↑ Tige choisie pour être conservée
- ↑ Legay M., Ginistry C., Bréda N. [2006]. «Que peut faire le gestionnaire forestier face au risque de sécheresse ?». Rendez-Vous techniques 11 : 35-40 (6 p., 4 fig., 11 réf. ).
- ↑ Bilan patrimonial ONF, 2006[pdf] (fr)
- ↑ Règlement National d'Exploitation Forestière ; Validé par l'ONF le 21 décembre 2007, publié au Journal Officiel du 08/03/08, il peut être mis à jour (avec publication au Journal Officiel et mise à jour sur le site Internet de l'ONF)
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